Médias
Avenir de la presse : vers une segmentation ou une diversification ?
Le Club de la Presse Anjou a organisé à l’Université Catholique de l’Ouest, à Angers, une soirée-débat sur l’avenir de la presse écrite et le thème des regroupements, des impératifs économiques et des ruptures technologiques. Plusieurs solutions ont été abordées dont la diversification par internet et les niches spécialisées.
Contact : clubpresseanjou@hotmail.fr
22 avril 2009. Autour du journaliste Gérard Royer, animateur de cette soirée, des personnalités du monde des médias locaux et nationaux ont débattu sur le sujet dont Jean-Marie Charon, sociologue des médias (CNRS), Alain Machefer, journaliste et directeur départemental de Ouest-France, Philippe Cohen, journaliste à Marianne, Emmanuel Guimard, journaliste Agence API Nantes.
« La perspective de voir mourir Libération ou Le Monde n’est pas abstraite », estime Philippe Cohen. A. Machefer donne une des raisons de la crise : « un canard marche sur deux pattes - la vente et la publicité - mais la publicité est bancale ». P. Cohen ajoute une seconde raison : « les lecteurs voient la même information dans les médias. Le conformisme pesant de voir partout la même opinion ». La logique de la concurrence aboutit à l’homogénéisation. Poussé par la pression du marché, le champ journalistique finit par proposer une production uniforme selon le sociologue Pierre Bourdieu qui évoque « la circulation circulaire de l’information ».
Pourtant la concurrence permet de stimuler les ventes selon A. Machefer : « on vend plus d’exemplaires quand deux canards se bataillent ». Le directeur départemental de Ouest-France pense aussi que le regroupement est positif. Il préconise de mutualiser les moyens, avoir un outil commun (N.D.L. : ici avec le Courrier de l’Ouest). « Depuis toujours le portage se fait à part ».
« L’information chaude était le commerce d’avant »
P. Cohen évoque : « la position de rente de rente de certains groupes de presse. Le capitalisme cherche-t-il à faire fuir la concurrence ? Il est tentant de fusionner les reporters dans un contexte de crise ». Alain Machefer ne partage pas cette perspective : « Là où il y a rente, les journaux crèvent, ils sont moins inventifs, plus du tout réactifs. Le prolongement, la diversification par Internet est nécessaire ».
Et les médias se sont emparés de nouveaux outils comme les flux RSS et depuis peu Twitter. Cependant, la « génération y » ou « net génération » est habitué à consommer des contenus sans payer. « L’information chaude était le commerce d’avant. Maintenant c’est Internet qui s’en charge et gratuitement », ajoute J-M. Charon. Mais « qui va payer l’information de demain ? » se demande Cohen. « Internet pète les frontières entre professionnel et non professionnel », ajoute-t-il. De plus les sources comme les services de communication se professionnalisent et s’approprient les nouvelles technologies. Emmanuel Guimard à la solution : « On payera sur des segments spécialisés. On ne payera pas sur de l’information dite facile ». Il est convaincu que les secteurs spécialisés en économie par exemple s’en sortiront mieux.
Et après les États généraux de la presse ?
J-M. Charon a rappelé les spécificités françaises différentes des pays anglo-saxons où l’État joue un rôle moins important. « En France, nous avons un retard économique et éditorial à rattraper. La presse n’est pas au bord du gouffre, mais il est nécessaire de réinventer les choses par une mutation. Comment avec un modèle économique, réinventer un contenu ? » se demande Charon. Outre la diversification par internet, selon lui, la P.Q.R. doit diversifier ses titres pour s’adresser à des publics différents. « Pas forcément des quotidiens, ça peut être des hebdomadaires », ajoute le sociologue. Selon lui, une activité externe est nécessaire.
Investir dans un autre titre, une diversification par internet ou les secteurs de niche semblent être des solutions. Malgré les mesures prises suite aux Etats généraux de la presse, l’avenir est pessimiste pour les prochaines années.